DCS A-10C II : premier test de l’early access

DCS A-10C II : premier test de l’early access

Pourquoi encore un A-10C dans DCS ?

Le A-10C pour DCS World est sorti en 2011. Neuf ans, dans l’univers du jeu vidéo et de la simulation, c’est long. Le module avait pris un coup de vieux graphique, bien que la modélisation des systèmes soit restée une référence incontestée. Quant à l’avion simulé, le A-10, il a également évolué face aux réalités du monde, comme à son habitude depuis sa mise en service en 1975 ! Donc, dans le cadre de ce projet A-10C II impulsé par un client institutionnel US (comme l’était le projet initial), Eagle Dynamics (ED) ne se contente pas d’un lifting esthétique, et nous allons voir pourquoi.

Le A-10A est né dans les années 1970 pour déboîter des blindés soviétiques en Europe centrale, en mission d’interdiction ou en appui au plus près de la « first line of troops » (FLOT), en étroite relation avec elle. Il connut sa première heure de gloire en déboîtant des blindés soviétiques de l’armée irakienne au Koweit et en Irak en 1991, selon des modes opératoires familiers. Mais on a alors eu besoin de lui la nuit pour chercher et détruire des cibles d’opportunité. Il fut très bon dans ce rôle, employant comme système de vision nocturne la caméra thermique du missile AGM-65D (un prophétique D comme dém**de-toi…) dont l’image était affichée sur le petit écran cathodique à droite de la planche de bord… Ainsi naquit l’idée d’un A-10 pourvu d’un système de navigation et d’armements (SNA) moderne, au cockpit compatible avec les jumelles de vision nocturne (JVN), pouvant délivrer toute une gamme d’armes guidées, et emportant une nacelle de désignation d’objectif à haute résolution pourvue d’une voie thermique. Ce fut le A-10C. Avant le démarrage du programme en 2005, les A-10A déboîtèrent encore un certain nombre de blindés soviétiques aux mains des forces irakiennes en 2003, avant de progressivement tirer leur révérence.

Au début, c’était comme ça : le cockpit du bon vieux A-10A, avec pour seuls raffinements un RWR et un petit écran pour projeter l’imagerie des Maverick…

Quand le module DCS A-10C sortit en 2011, il représentait donc alors une mouture très récente du A-10, déjà bien connue pour ses exploits dans un type de guerre très différent : l’appui aérien très rapproché au profit de troupes au sol engagées contre des insurgés dans des milieux ruraux souvent difficiles (Afghanistan), voire parfois en milieu urbain dense (Irak). Pendant que cet excellent module mûrissait sur nos disques durs, la guerre évolua. L’ennemi, invariablement dominé dans les airs et en termes d’artillerie, était désormais équipé de matériels modernes capturés sur les armées locales (Irak, Afghanistan, Syrie). Missiles antiaériens légers et à courte portée (MANPADS) et systèmes de vision nocturne devenaient des adversaires quotidiens des forces occidentales, mettant leurs aéronefs en danger au même titre que les missiles antichars guidés menaçaient leurs blindés. La passe canon ou roquettes à basse altitude, longtemps en vogue en Irak et Afghanistan, commençait à poser quelques problèmes de sécurité, de même que le show of force au raz des marguerites… L’ennemi s’adaptait à la domination aérienne occidentale en recherchant le contact très rapproché lors des combats, pour rendre impossible la délivrance d’armements guidés. Les combats gagnaient de plus en plus les villes, en présence de populations parfois maintenues sur place de force pour limiter le risque de frappes aériennes. La frappe meurtrière sur l’hôpital MSF de Kunduz opérée par un AC-130 qui appuyait des forces afghanes au contact a illustré dramatiquement le problème en 2015. Puis les batailles urbaines extrêmement intenses contre Daesh comme à Raqqa et Mossoul ont confirmé la tendance. Dans ce type de combat où la situation change en quelques minutes et où le risque de tuer des alliés et des civils est majeur, il faut, jour et nuit, raccourcir les délais entre la demande de frappe et son exécution, et pouvoir tirer à distance de sécurité des armements extrêmement précis mais suffisamment peu vulnérants pour ne détruire que l’ennemi. Le A-10C tel qu’il est aujourd’hui est la réponse à ce cahier des charges. C’est lui que représente le nouveau module DCS A-10C II.

DCS A-10C II : combien ça coute ?

Eh bien ça dépend des cas de figure…

  1. Vous possédez déjà DCS A-10C premier du nom : DCS A-10C II vous coutera 19,99$. 9,99$ si vous l’achetez d’ici le 30 octobre 2020. Vous conserverez le A-10C initial en plus du nouveau.
  2. Vous ne possédez pas DCS A-10C premier du nom : il vous coutera 79,99$. Et vous accèderez aux deux modules. Notez qu’il n’y aura probablement pas grand monde pour utiliser le premier en disposant du second, hormis les fanas de reconstitution historique.

Notez que le module DCS A-10C premier du nom coute 59,99$. Selon ED, le A-10C initial continuera d’être mis à jour. Ceci intéressera sans nul doute ceux qui ont acquis des campagnes payantes pour DCS A-10C.

Dans le cas d’une mise à jour, le tarif est accessible. Dans le cas d’une première acquisition, notez qu’en achetant DCS A-10C puis en l’upgradant dans un second temps avant le 30 octobre 2020, vous économiserez quelques sous (59,99$ + 9,99$ = 69,98$ au lieu de 79,99$). Après le 30 octobre, ça vous fera économiser 1 cent que vous pourrez réinvestir dans la pierre, à moins que votre banque vous prélève des frais quand vous effectuez des achats à l’étranger…

Voilà pour les gros sous. Maintenant, la question cardinale : est-ce que ça les vaut ? Nous allons modestement tenter d’y répondre.

Quoi de neuf dans ce module ?

Le visuel

le modèle 3D extérieur est au meilleur niveau du moment, là où DCS A-10C a clairement pris un coup de vieux. Le niveau de détail va jusqu’à la restitution des effets des impacts de la perche de ravitaillement en vol du tanker contre le museau du A-10 : celui-ci est cabossé, comme sur les vrais. Tout le reste est à l’avenant et servi par des textures de très belle facture, au point d’ailleurs que certains emports employant de vieux modèles 3D et des textures anciennes (les nacelles de guerre électronique notamment) dénotent étrangement sur ce magnifique avion virtuel. Car oui, ce modèle restitue tellement bien l’irrésistible laideur du Hog qu’il en est beau à tomber !

DCS A-10C premier du nom : un modèle 3D encore joli mais un peu daté tout de même

DCS A-10C II : un niveau de modélisation 3D conforme aux standards actuels, très nettement supérieur à l’ancien

Pour en rester au visuel, le cockpit a évolué, lui aussi, sur le plan graphique. Modélisation et textures sont désormais aux standards actuels de ce point de vue. Il est à noter que DCS A-10C premier du nom a bénéficié gratuitement de ce salutaire dépoussiérage. DCS A-10C II intègre dans son cockpit les évolutions techniques propres aux A-10C au standard le plus récent : apparition du bloc de commande du viseur de casque Scorpion et, prévue pour la fin du statut « early access », radio AN/ARC 210. DCS-A-10C II propose deux options pour le cockpit : usagé ou neuf sorti d’usine. L’usagé est très crédible et tout à fait lisible. Peut-être même pas assez usagé et trop propre… La version neuve est bien mignonne mais pas forcément pertinente. Personne qui soit en âge de piloter un vrai A-10 en unité opérationnelle n’en a vu un neuf…

Le « bureau » : du classique qui côtoie du moderne, avec une bonne ergonomie… et une superbe modélisation

Les systèmes

On retrouve là le SNA du A-10C tel qu’on le connaissait déjà. C’est un phénomène, qui permet tout ce dont on peut rêver en matière de navigation. On peut même opérer des relevés de vent et de température dans les différentes couches de la masse d’air, les intégrer au SNA et ainsi alimenter le calculateur de largage des bombes… Autant dire, pour le novice, des dizaines d’heures d’apprentissage et des centaines pour vraiment maîtriser tout cela sur le bout des doigts. À cet inventaire déjà flatteur, DCS A-10C II propose un ajout, un seul, mais de taille : le Scorpion de chez Thales. Un viseur de casque ? Pas seulement. C’est aussi un carrefour de fusion de données issues des senseurs de l’avion et des autres acteurs du champ de bataille.

Le Scorpion de chez Thales : un dispositif inégalé dans DCS et qui change la vie, IRL comme en simu

Vous pouvez y voir des symboles mettant en exergue vos points de navigation, les aéronefs alliés et adverses, votre sensor point of interest (SPI), la cible désignée par le JTAC, ainsi qu’une projection de l’imagerie de votre nacelle de désignation laser. Aucune phrase ne saurait exprimer à quel point cet équipement change la vie du pilote ! D’autant qu’il est compatible avec les jumelles de vision nocturne. Par ailleurs, comme il est possible, en multijoueur, de broadcaster son SPI, pas besoin, pour partager la localisation d’une cible ou d’un point important au sol, d’illuminer quelque chose au laser, ni d’envoyer des coordonnées en vocal ou par message texte : un appui prolongé sur TMS left et votre SPI s’affiche en bleu sur le Tactical Awareness Display (TAD) et… dans le casque des autres alliés volant sur le A-10C II. Tout cela fluidifie la coopération entre ailiers de façon remarquable.

Avec le Scorpion, ne cherchez plus votre SPI sur la carte défilante ou dans le HUD. C’est dehors que ça se passe !

En termes d’armements, on a là :

  • le missile AGM-65E2/L à guidage laser, évolution la plus récente du Maverick, optimisée pour frapper des cibles mobiles
  • la bombe GBU-54 : une Mk-82 de 227 kg pourvue de deux kits de guidage : inertiel hybridé GPS (JDAM) et laser (pour frapper des cibles mobiles et /ou modifier la trajectoire terminale)
  • les roquettes APKWS de 70mm guidées laser sous deux versions : M151 antipersonnel (c’est du 70mm, une grosse grenade en somme) et M282 à charge creuse (pareil : c’est du 70mm, ça ira pour du blindé léger, pas du char lourd)

Les nouvelles armes du A-10. De gauche à droite : bombe GBU-54, missile AGM-65E2/L, panier de roquettes APKWS à guidage laser

Le nouveau Maverick ouvre des perspectives au A-10C pour frapper certaines cibles mobiles spécifiques (défenses antiaériennes par exemple) à distance de sécurité sans devoir composer avec les capacités de discrimination et de verrouillage parfois limitées des versions à guidage infrarouge ou TV. Il est également efficace contre les infrastructures : nous l’avons testé avec succès sur les hangarettes aviation de la nouvelle map Syrie.

La GBU-54, c’est trois armes en une : une bombe à guidage inertiel/GPS (JDAM), une bombe à guidage laser (BGL) et un panachage des deux : il est en effet possible de la larguer aux coordonnées puis d’affiner la trajectoire terminale au laser (voir notre vidéo).

Les roquettes à guidage laser Advanced Kill Weapon System (APKWS) sont, avec le système Scorpion, l’un des deux ajouts de ce modules qui vont vraiment vous changer la vie ! La M151L traitera efficacement l’infanterie, et la M282L se chargera de tout véhicule qui ne soit pas un char lourd. Embarquée dans des paniers standard (jusqu’à 3 paniers de 7 roquettes sur un même pylône), leur kit de guidage est réparti sur les ailettes escamotables. Il détecte la tache laser au début du vol de l’arme.  Ces roquettes portent à 5 milles nautiques et peuvent être tirées à plus de 10.000 ft/sol, à l’abri des MANPADS et de la plupart des canons antiaériens. Elles vous permettront de ne plus charger votre A-10 comme un mulet avec des grappes de bombes et de missiles le rendant aussi manoeuvrant qu’un motoculteur dans une salle de bain.

Tout cela est servi par une nacelle de désignation à trois voies : CCD grand angle, CCD fort grossissement et infrarouge (FLIR). Le dispositif est irréprochable dans sa fonction de transmission de coordonnées géographiques au SNA et aux armes. Une fois verrouillé, il présente une propension à décrocher quand on le fait travailler dans l’axe de l’avion (il semblerait que ce soit réaliste). En matière de désignation laser, à notre sens, il dysfonctionne du fait d’un modèle de masquage taillé à la hache avec les pieds (voir notre vidéo). Après quelques débats enflammés, ED a pris en compte nos remarques et nous ne manquerons pas de vous tenir informés de l’avancement du travail. La nacelle demeure amplement utilisable, mais le buddy-lasing en virage constant est rendu inutilement pénible, de même que l’auto-illumination après dégagement latéral.

L’interface entre le pilote et les systèmes est assurée par un agencement des commandes selon la philosophie Hands On Throttle and Stick (mains sur la manette et le manche, HOTAS), deux pavés de touches (un sous le HUD, un autre avec l’interface de navigation CDU) et deux écrans multifonctions (MFD). Il n’y là a rien de nouveau par rapport à l’ancien système hormis les commandes propres au système Scorpion et un petit changement relatif au pot Litening : conformément à ce qui se pratique « en vrai », le retour au centre des caméras ne s’obtient plus via une commande HOTAS mais par une réinitialisation via un OSB (un des boutons bordant les écrans multifonctions). On a là un des meilleurs agencements HOTAS possibles, que beaucoup considèrent comme meilleur et plus intuitif que sur F/A-18 et F-16.

Au rayon des nouveautés, ajoutons un modèle de vol plus agréable et se revendiquant plus conforme au vrai : on gagne en manœuvrabilité, et l’avion perd sa propension vicieuse à décrocher sur l’aile dès l’alarme sonore. En somme, il est nettement plus permissif. En termes de performances pures, ça reste un A-10 : ça se traîne pas mal… Mais avec 1 AGM-65E2/L, 1 GBU-54, 42 roquettes APKWS, le plein de munitions pour le canon, 2 AIM-9M, 1 nacelle Litening et 1 nacelle de guerre électronique, nous avons décollé avec les pleins et assuré une montée à 20.000 ft à 3000 ft/min de moyenne, ce qui n’est tout de même pas scandaleux. Notons que DCS A-10C premier du nom bénéficie également de ce modèle de vol revu et corrigé.

Un tour d’horizon en vidéo

Conclusion

Point de vue du joueur solo

L’exploration des systèmes et leur exploitation en toute fluidité exigent un nombre élevé d’heures d’exercice, le nez dans le manuel et dans les tutos disponibles sur la toile. C’était déjà le cas de DCS A-10C premier du nom, et cette nouvelle itération du phacochère renforce encore cet aspect, tout en rendant l’avion virtuel encore plus ludique : il vole mieux, son système Scorpion le rend incontestablement plus ludique, et on peut partir pour une longue mission où l’on traitera un nombre incalculable de cibles avec un emport réaliste (ce que ne sont pas les grappes de missiles Maverick et de bombes guidées qu’on voir si souvent sur nos A-10 virtuels…) grâce aux roquettes APKWS. Nous avons pour notre part passé des heures à « essayer des trucs » en vol solo, que ce soit en navigation, essai d’armements, ravitaillement en vol… Et nous en passerons assurément quelques centaines voire milliers d’autres.

Point de vue du joueur en ligne

Cette nouvelle itération du A-10C est très portée sur le combat réseau-centré, à travers les fonctionnalités du système Scorpion et la possibilité de l’associer au broadcast du SPI avec les autres A-10C en vol. C’est là du pain béni pour le vol en ligne. Une fois les binômes (ou plus) bien rodés dans la répartition des rôles entre détection, illumination, frappe et surveillance de la situation tactique, la voie est ouverte vers des heures de grand panard ! On peut désormais conserver les yeux dehors, que ce soit pour la navigation ou le suivi d’une cible, tout en partageant des infos. La quantité de cibles traitées en un même laps de temps peut s’en trouver démultipliée, d’autant que les incontournables et abondantes roquettes APKWS s’associent idéalement à la longue endurance sur zone de l’avion. Il faudra juste prévoir des copains pour vous nettoyer le ciel si vous évoluez près de chasseurs ennemis. Et leur faire assurer le SEAD si des systèmes SAM à moyenne ou longue portée infestent le secteur.

Synthèse

Un excellent module, vraiment. La vidéo vous a montré quelques maladies de jeunesse de ce nouvel oiseau virtuel, mais il vient à peine de sortir. Ne revenons pas sur nos conseils d’achat ou de non achat, également explicités dans la vidéo, mais notons ce qui fait la force et la faiblesse de ce module. Du côté des forces : il est d’une beauté à tomber ; il est bien optimisé en termes de gestion des ressources machine ; il est extrêmement immersif ; pour les amateurs de « mud », il est terriblement ludique, pourvu d’une profondeur rarement atteinte en simulation militaire. Du côté des faiblesses : c’est un A-10, et il y en a qui n’aiment pas son côté tracteur agricole, puissant mais lent ; il évolue dans DCS World, avec son JTAC semi-débile et ses bombes et roquettes souffreteuses qui laissent la plupart des véhicules (même non blindés) en état de rouler et de combattre hors impact direct. Le pire ennemi d’ED, c’est ED lui-même. Contraint par son modèle économique de publier des nouveautés à cadence élevées, cela le divertit d’un certain nombre de travaux de fond. Et ça, contrairement à ce magnifique module qu’est le A-10C II, ce n’est pas nouveau…

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